La Quête de l'infini

3/ La plaine de Lamir
 
 

La pluie tombait, froide et insouciante. Elle ruisselait le long des rares et maigres arbustes de la plaine.

Elle ruisselait en torrents le long de la colline surplombant la plaine. Les torrents formaient d'immenses flaques au bas de cette colline, et sur toute la plaine inégale. Leur surface était continuellement trouée par les gouttes qui venaient augmenter leur taille.

L'eau ruisselait sur les poils lisses des chevaux, puis descendait le long de leurs pattes musclées, se mêlant à leur sueur.

Elle ruisselait le long du visage de Thor, et un filet d'eau coulait dans son cou tandis qu'il contemplait ce spectacle à la fois si saisissant et si commun, écoutant le fracas léger des gouttes sur le sol, sur les flaques, sur les chevaux...

"Il faut attendre que la pluie cesse pour franchir cette plaine, sinon les chevaux risquent de se tordre les chevilles en descendant la colline, et admettons que l'on arrive en bas sans encombres, ils s'enliseront dans la boue.

-Tu as raison, Ereth, attendons..."
 
 

Ils restèrent silencieux jusqu'à ce que la pluie s'apaise, et sous une légère bruine persistante, il désellèrent les chevaux, puis les essuyèrent du mieux qu'il purent avec les linges qu'ils avaient pu préserver de l'humidité.

Puis, avec un peu de poudre d'Agor, ils allumèrent un feu, et l'alimentèrent avec du bois préalablement séché aux flammes produites par la miraculeuse poudre de Thor.

Cette poudre, appelée poudre d'Agor, du nom du sorcier qui la composa, lui avait été confiée par un vieux sage du village, c'était celle qu'utilisait son père, lorsqu'il partait pour plusieurs jours.

Son père lui avait toujours conseillé d'en avoir sur lui à tout moment pour le cas où.

"Le feu te gardera en vie, il te réchauffera, te permettra de cuire ta nourriture, et te gardera des bêtes sauvages; le feu est un allié, pour qui sait s'en faire un allié", disait Tharum-le-Rouge.
 
 


* *


*









Le soleil brillait déjà lorsque Thor ouvrit les yeux. Il en fut surpris, mais compris aussitôt, en effet, à l'horizon, rien. L'horizon était plat, à perte de vue s'étendait la plaine de Lamir.

Le soleil était encore bas dans le ciel, et ses reflets sur les flaques d'eau résiduelles avaient quelque chose de surnaturel, il contemplait toujours cette scène lorsqu'Ereth lui dit:

"Je pense que l'on peut repartir désormais, nous ferons le tour des flaques d'eau.

-Paradoxalement, la journée s'annonce chaude, je crois que cette plaine mérite sa réputation de désert infranchissable."

Ils sellèrent donc les chevaux, et entreprirent de descendre la colline.
 
 

* *


*



Un éclair noir jaillit d'une poitrine, et les barbares furent réduits en tas d'os, leurs chairs consumées par la puissance de l'éclair.

Un silence de mort prit place devant le château, puis des cris de joies s'élevèrent:

"Nous sommes sauvés !"

Puis quelqu'un recouvrit la partie gauche de son torse, et lança son cheval au galop.

Un hurlement :

"Attendez ! Ne partez pas ! Qui êtes-vous?...

Le cheval continua sa course. Un dernier cri s'éleva :

-Merci !"

Puis, plus rien, à part le bruit à peine perceptible maintenant des sabots du cheval sur le sol rocailleux.
 
 


* *


*



"Nous sommes presque en milieu de journée, et toujours rien à l'horizon, cette plaine est-elle donc totalement déserte ? , s'interrogea Ereth.

-Peut-être pas, regarde là-bas, ne vois-tu pas une espèce de halo, et une masse sombre derrière ?

-Maintenant que tu le dis, Thor...de toute façon , nous n'y serons pas avant la nuit.



* *


*

Ils avançaient maintenant à la clarté de la lune et distinguaient un épais brouillard devant eux, et une masse sombre derrière, une sorte de gros bloc de pierre à ce qu'ils pouvaient en juger.

Les deux cavaliers pénétrèrent bientôt dans l'épaisse brume, ils étaient enveloppés et devaient regarder au sol pour pouvoir se repérer, tellement la lune diffusait sa lumière dans le brouillard, formant ainsi un mur blanc tout autour d'eux.

Thor se laissa aller à un état de veille, tout ce qu'il percevait lui semblait filtré, comme ce brouillard visuel qui l'enveloppait, un brouillard semblait envelopper son esprit.

Aucun bruit, à part ce bruit de fond, sourd et distant. Aucun mouvement, son cheval s'était arrêté, excepté cette vibration sourde et distante elle aussi, peut-être même cette vibration et ce grondement provenaient d'un seule et même source...

Un cri, qui tira Thor de sa torpeur, il secoua la tête et regarda autour de lui, il remarqua que son cheval s'était arrêté, et vit celui d'Ereth, un peu plus loin devant, il le percevait à peine, mais il crut voir que le cheval était penché en avant, sur quelque chose, une masse inerte au sol...Il s'approcha, et vit Ereth, au sol, une flèche dans la poitrine. Il voulut descendre de cheval pour sauver son compagnon (si cela était encore possible ), mais il n'en eut pas le temps, un tremblement ébranla le sol, accompagné d'un grondement assourdissant. Thor se tourna en direction du grondement et vit alors ce qu'il prit d'abord pour un dragon, mais l'animal était dépourvu d'ailes, et son corps était allongé, comme celui d'un serpent gigantesque...une guivre !

Thor sortit son glaive dans un fracas métallique, lança son cheval au galop, mais celui-ci, effrayé, se cabra, renversant son cavalier, et s'enfuit, mais la guivre le happa d'un mouvement d'une rapidité effrayante.

Thor se releva, brandit son glaive, et se précipita sur l'animal en hurlant.

La guivre ouvrit sa gueule, et se projeta en avant, mais Thor roula de côté, se releva, et se retrouva au-dessus de la tête de la guivre, qui avait raté sa proie, et restait surprise, la gueule au ras du sol ; il lui asséna un coup de glaive, lui laissant une profonde entaille dans le cou.

Il s'attendait à ce qu'elle hurle, mais elle n'en fit rien, et se retourna vers lui, ils étaient face à face.

L'haleine brûlante de l'animal empêchait Thor de respirer.

Il se préparer à frapper de nouveau, lorsqu'un doute l'envahit, il regarda la blessure de la guivre...plus rien !

Il remit son arme au fourreau, sortit un petite bourse de cuir, et dit en semant un poudre violette sur la guivre :

"Que la poudre magique brise le sortilège, et que la réalité reprenne sa place !"

A ce moment, un cri de rage éclata, le brouillard se dissipa, la guivre disparut, Ereth se releva, se tâtant la poitrine, ne comprenant pas pourquoi la flèche et la plaie avaient disparues. Alors que le cheval de Thor apparaissait à l'endroit où se tenait la guivre, Thor lança :

"Où es-tu, montre-toi ! Tu as perdu, j'ai vaincu ton sortilège...j'ai entendu ton cri de défaite, montre-toi !

-Qui es-tu ?, tu es le premier à survivre, et surtout à me vaincre, tu as le droit de me tuer, dit le vieil homme qui venait d'apparaître devant Thor.

-Je n'ai pas l'intention de te tuer, vieux mage.

-Tant mieux pour toi, car je ne t'aurais certainement pas laissé faire, gamin.

-Alors tout ça, le brouillard, la montagne sombre, la flèche, le grondement, le tremblement, et la guivre, ce n'était qu'une illusion ?, s'enquit Ereth.

-Oui, mais qui ne peut exister que si tu y crois, c'est comme cela que je l'ai vaincu, j'ai compris que c'était de la magie, et non la réalité, et je possède de plus une poudre brise-sortilège, répondit Thor.

-Vous êtes tous deux en quête de l'immortalité, annonça le vieux mage.

-Mais comment..., s'étonna Ereth.

-Je suis un mage, ne l'oublie pas mon garçon.

Puis s'adressant à Thor :

-Je tiens à venir avec vous, je suis déjà très vieux, je vit depuis deux cents ans, grâce à ma magie, mais elle a des limites, il me faut donc acquérir l'immortalité, pour avoir toujours plus de sorts, et de puissance... Je pourrais vous être utile je pense.

-Je pense aussi, acquiesça Thor.

-Mais tu es fou Thor, il m'a tué, enfin presque, et toi tu veux qu'il vienne avec nous !

-Ne crois-tu pas qu'avoir une guivre avec nous, et dieu sait quoi d'autre, puisse être utile ?

-Si...bien sûr. Ereth hésita un instant, puis reprit : Alors c'est d'accord, mais sache vieil homme que nous nous battrons, Thor et moi pour avoir ce qui nous...ce qui ME revient de droit !

-Disons que c'est alliance temporaire, jusqu'à ce que nous trouvions la dague de Biophos, puis après ce sera chacun pour soi, précisa Thor.

-C'est bien comme cela que je l'entends, dit Ereth.

-Moi aussi messieurs, rajouta le vieux mage.

Puis il dit :

-Mon nom est Lamir, je suis, où plutôt j'était, le maître de cette plaine, conclut Lamir.

Thor, Ereth et Lamir décidèrent de partir le lendemain matin, dés l'aube.
 
 


* *


*





Les trois cavaliers avaient repris la route dés les premières lueurs de l'aube, et se dirigeaient plein Est. Ils voyageaient en silence, Thor semblait absorbé dans ses pensées, Lamir semblait pour sa part ne penser à rien, et de son coté, Ereth lançait parfois un regard du coté du mage, visiblement il gardait un sentiment de méfiance à l'égard du vieil homme.

Ereth connaissait lui une autre sorte de magie, en effet, son peuple en maîtrisait une particulièrement bien.

Il était issu d'un peuple où l'on était guerrier de père en fils, mais il ne pouvait y avoir qu'un suel guerrier par famille, le père.

Puis, lorsque celui-ci mourrait, la plupart du temps en défendant son village, là intervenait la seule magie qu'utilisait ce peuple, là seule qui, selon Ereth, était digne.

L'âme du père s'incarnait dans une arme, qui revenait à son fils, ou à une de ses descendants, cette arme, un sabre dans le cas d'Ereth, prenait alors cette coloration blanche, et acquérait une solidité à toute épreuve.

Désormais en difficulté pour repousser les assauts incessants des barbares, ce peuple, les Ivouss, avait décidé d'envoyer l'un des leurs en quête de la dague de mort. Avec un guerrier immortel, et le pouvoir de mort, ils pourraient se défendre contre les barbares, et même les anéantir, pour venger leurs victimes.

Ereth avait été choisi, son père avait été le plus puissant guerrier, et Ereth, en tant que descendant de la lignée des Darmor, avait tenu à partir seul, bien décidé à venger son père, après avoir mené à bien cette quête de l'immortalité.

La dague de mort était réactivée, mais cela importait peu, il allait s'emparer de la dague de vie, maintenant qu'il avait pu la localiser, et ol pourrait même réssuciter son père et toutes les victimes de son village.

Pour Ereth, les mages n'étaient que des illusionistes, indignes de confiance, sournois, et la vraie et seule magie était celle qui lui avait donné ce puissant sabre, et celle qui lui donnerait l'immortalité et le pouvoir de réssuciter les Ivouss sauvagement massacrés par les barbares de Nobedist.

De plus, il ne pouvait s'empêcher de garder bune mauvaise impression, à la suite de leur première rencontre avec ce vieillard malfaisant.

Il avait accepté

que Lamir les accompagne, car Thor le voulait, il respectait le jeune homme, qui lui aussi recherchait la dague de Biophos pour une cause juste, et qui en avait aussi après les barbares.
 
 

Le vieux mage, de son coté, n'était pas inquiété par ces regards haineux qu'il avait surpris. Des guerriers, il en avait vu, et bien que les Ivouss soient courageux, et possèdent des armes redoutables, il restait amusé par cette haine.

Par contre, mieux valait qu'il soit ami avec Thor, ce jeune homme était de la même trempe que son père, courageux,puissant, mais aussi rapide, agile, et surtout réfléchi.

C'était un puissant guerrier qui savait utiliser son cerveau, de plus, son coeur était pur, il était exactement comme son père jadis, car Lamir avait connu Tharum-le-Rouge autrefois, l'avait affronté, puis avait combattu à ses cotés.

Désormais, il avait affronté son fils Thor, et faisait route avec lui.

Mais cela ne se reproduirait pas avec une troisième génération, car à la fin, Lamir se verrait dans l'obligation de tuer Thor, car celui-ci ne se laisserait pas subtiliser la seule chance de ressuciter sa mère.
 
 

De son coté, Thor ne se préoccupait pas de ses compagnons, il revoyait son impuissance lorsque son père et sa soeur avaient étés tués, il était trop jeune, et sa nouvelle impuissance à la mort de sa mère, il était arrivé trop tard...

Il ne concevait désormais sa vie que pour réussor sa quête et réssuciter sa mère.

C'était la vie avec Itopa ou la mort dans cette quête, il n'avait pas d'autre alternative, il en était plus que convaincu, mais il se battrait pour la vie, pour leurs vies, rien ni personne ne l'empêcherait de revoir un jour sa mère.
 
 
 
 

A suivre… To be continued …                                             Return to main page

Chapitre 4. Chapter 4.                                                       Retour à la page principale